Programme AMBRE : La filière du bâtiment se mobilise pour le réemploi des matériaux de construction

Le réemploi dans le bâtiment : un défi majeur pour la construction durable

Face aux enjeux environnementaux et aux objectifs de l’économie circulaire, le secteur de la construction française franchit une étape décisive. Le 7 octobre 2025, sept acteurs majeurs de la filière bâtiment ont officiellement lancé AMBRE (Agir et Mobiliser pour Bâtir et rénover avec le REemploi), un programme pluriannuel ambitieux visant à massifier le réemploi des produits et matériaux de construction.

Un contexte réglementaire favorable mais insuffisant

Depuis la loi AGEC (loi anti-gaspillage pour l’économie circulaire) de février 2020, le développement du réemploi est devenu un objectif prioritaire dans le secteur de la construction. Cette législation a notamment instauré :

• Le diagnostic PEMD obligatoire avant démolition ou rénovation de bâtiments de plus de 1 000 m²
• La Responsabilité Élargie du Producteur (REP PMCB) mise en œuvre depuis mai 2023
• Un objectif ambitieux de 4% de taux de réemploi à l’horizon 2027
• La constitution d’un réseau de points de reprise des matériaux

Complétée par la RE2020 qui impose la maîtrise de l’empreinte carbone des bâtiments, cette réglementation crée un cadre favorable au réemploi. Pourtant, les chiffres restent décevants : selon l’ADEME, seulement 1 % des matériaux de construction sont actuellement réemployés en France. [Source : Réemploi des matériaux de construction]

Les freins au développement du réemploi dans le BTP

Des obstacles techniques et assurantiels

Le principal frein au réemploi des matériaux de construction réside dans sa qualification en technique non courante, entraînant des complications majeures :

• L’assurabilité : le réemploi n’est pas couvert par les polices d’assurance construction classiques (décennale, Dommages-Ouvrage)
• La requalification : difficultés pour évaluer les performances résiduelles des matériaux
• La traçabilité : questionnements sur la responsabilité et la conformité aux normes
• Le coût : une organisation de filière à repenser entièrement

Des signaux positifs émergents

Malgré ces obstacles, la structuration du réemploi progresse :

• Développement de centres de reconditionnement démontrant des processus de requalification
• Publication en 2024 du premier référentiel de réemploi en France par la filière acier, reconnu en technique courante par la Commission Prévention Produits de l’AQC
• Lancement du projet SPIROU par le CSTB avec 10 notes méthodologiques de diagnostic et d’évaluation des performances

AMBRE : un programme collectif pour lever les freins

Sept pilotes pour fédérer la filière

Le programme AMBRE est piloté par sept organisations majeures du secteur :

1. CAPEB – Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment
2. FFB – Fédération Française du Bâtiment
3. USH – Union sociale pour l’habitat
4. AIMCC – Association des Industries des Produits de Construction
5. France Assureurs
6. CSTB [GD2] – Centre Scientifique et Technique du Bâtiment
7. AQC – Agence Qualité Construction (secrétaire technique)

Trois axes stratégiques pour 4 Ans

Le programme AMBRE s’articule autour de trois axes complémentaires :

Axe 1 : capitaliser, exploiter et valoriser les retours d’expériences

Création d’outils et de ressources pédagogiques à partir des opérations exemplaires pour diffuser les bonnes pratiques de réemploi dans le bâtiment.

Axe 2 : fiabiliser et sécuriser les pratiques professionnelles

Construction d’un cadre technique fiabilisé avec :

• Rédaction de référentiels techniques
• Définition des obligations et responsabilités de chaque acteur
• Développement de ressources pour la sécurisation des pratiques
• Focus sur les matériaux et produits prioritaires

Axe 3 : massifier, vulgariser et diffuser les bonnes pratiques

Facilitation de l’appropriation des pratiques de réemploi par tous les professionnels du secteur, des artisans aux maîtres d’ouvrage.

Une vision partagée pour instaurer la confiance

L’ambition du programme AMBRE est de fédérer tous les acteurs de la filière autour d’une vision commune des pratiques de réemploi. Cette mobilisation collective vise à instaurer un climat de confiance mutuelle indispensable au développement du secteur.

Avec une durée estimative de 4 ans, le programme se positionne comme le catalyseur nécessaire permettant une massification du réemploi dans les années à venir.

Des acteurs complémentaires pour une approche globale

Chaque acteur apporte une expertise spécifique :

• CAPEB et FFB représentent les artisans et entreprises qui mettent en œuvre le réemploi
• USH mobilise le secteur du logement social, acteur majeur de la construction
• AIMCC engage les industriels dans l’écoconception et la traçabilité
• France Assureurs travaille sur les solutions assurantielles adaptées
• AQC garantit la qualité et la prévention des désordres
• CSTB apporte son expertise technique et scientifique

Réemploi et économie circulaire : un enjeu environnemental majeur

Le développement du réemploi dans la construction s’inscrit dans une logique d’économie circulaire essentielle à la transition écologique du secteur du BTP. En donnant une seconde vie aux matériaux de construction, la filière :

• Réduit les déchets du bâtiment
• Diminue l’empreinte carbone des constructions
• Préserve les ressources naturelles
• Crée de nouveaux emplois dans la filière du réemploi

Conclusion : un tournant pour la construction durable en France

Le lancement du Programme AMBRE marque un tournant décisif dans l’histoire du réemploi des matériaux de construction en France. En fédérant les acteurs majeurs de la filière bâtiment autour d’objectifs communs, ce programme pluriannuel pose les bases d’une transformation profonde des pratiques professionnelles. L’ouverture du programme à l’ensemble des acteurs intéressés de la filière témoigne d’une volonté de co-construction et d’intelligence collective. Cette démarche collaborative sera déterminante pour atteindre des objectifs ambitieux en matière de réemploi et installer durablement cette pratique dans le paysage de la construction française